Avril 2014

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Je laisse aller




Vendredi 4 avril 2014

Je n'en ai pas fêté l'anniversaire mais voilà dix ans que je vis seul ! Dix ans de solitude plutôt heureuse dont je n'ai que rarement ressenti le poids, me réjouissant bien davantage de la légereté que procure le sentiment de liberté. J'aime cette vie en solo, que je veille à conserver jalousement... n'en déplaise aux quelques amies-amantes qui auraient apprécié de partager un peu plus longuement nos temps communs. Jusque-là, je n'ai pas changé de cap...

Pourtant, depuis quelques semaines la solitude se fait plus pesante. Ma vie me semble être un peu morne. Je n'ai rien vécu de bien exaltant depuis mon dernier voyage au Québec, et n'ai pas vraiment de projets en vue. Comme s'il me manquait l'entrain et l'enthousiasme nécessaires. Or j'associe cet enthousiasme à la notion de partage. Je dirais même que c'est l'idée du partage qui suscite mon enthousiasme !

Sauf que, en dehors de mon activité professionnelle,  je ne partage plus grand chose de motivant...

Terminées les grandes explorations intérieures, suspendus les épisodes de découvertes palpitantes, perdues les relations d'autrefois. Je ne vis plus que du connu. Presque du routinier. En manque d'échanges approfondis ? Peut-être bien...

Même le filon que représentait le monde d'internet semble être épuisé. Je n'y trouve plus de quoi contenter ma soif de réflexion. Ou bien est-ce moi qui n'ai plus la même curiosité ? Ou qui en voudrait davantage ? Ou qui ait trop de réticences à aller vers l'autre ? Hum... je me demande si je ne suis pas en train de virer à un défaitisme passif... Jadis fascinant, l'univers numérique a perdu beaucoup de son attrait pour moi. Comme si l'hémorrhagie continuelle des connaissances d'autrefois m'avait soudain mis face à un vide : combien en reste t-il qui s'expriment comme j'aime lire ? Et moi, qu'est-ce que je fais encore là depuis si longtemps ?

Et que fais-je pour contrer ce que je déplore ? Rien ! Je laisse aller.
En ce moment je n'y crois plus...


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Couper les ponts




Samedi 5 avril 2014


Je me trouve en ce moment dans une phase un peu délicate de mise en retrait. Je m'isole, en toute conscience, mais sans le vouloir vraiment. En fait... je ne sais pas comment faire : j'ai à la fois envie de contacts et de solitude. Je me sens fragile, sensible, vulnérable. Alors je me protège en m'isolant.

En même temps je me dis que ce n'est certainement pas la meilleure chose à faire quand on ne se sent pas très bien, mais je ne parviens pas à aller vers les autres. Je me sens comme une source à sec, sans rien à apporter. Comme une éponge deshydratée, avide d'apports extérieurs... que je n'irai pas solliciter. Pour être franc, je crois que j'ai besoin d'amour. Pas d'amour-amoureux, mais d'amour tout court. De bienveillance, de soutien, d'amitié, de douceur. Envie de bras chaleureux et enveloppants.

Je ne me souviens pas avoir ressenti ce "besoin" depuis longtemps.

D'où provient-il ? Je crois qu'il m'indique un épisode de fragilité conjoncturelle, latent depuis quelques semaines. L'aspect professionnel, fort sollicitant, y est pour quelque chose, mais bien davantage l'est la fin d'un "projet" de réconciliation qui m'avait porté dix années durant. Plus récemment le travail de réflexion entrepris autour d'Ego numericus m'a déstabilisé, en me mettant face à certains aspects de mon expression en ligne. Il aura suffit que s'ajoute à ce contexte une discussion décevante avec Charlotte pour que mon optimisme vacille et me laisse un peu hagard, sans énergie.
J'attendais beaucoup de la proposition de dialogue que j'avais faite à Charlotte, en février, tout en étant un peu inquiet de ce que nous pourrions nous dire. J'avais l'intuition que ce ne serait peut-être pas aussi simple que je le souhaitais. La semaine dernière elle est passée me voir pour me demander quelques outils et, tandis que nous parlions sur un registre un peu personnel, j'ai renouvelé ma proposition. Il m'avait semblé qu'elle y était favorable et, sans précipitation aucune, je voulais simplement savoir où elle en était. Cette fois elle a très vite mis en avant ses réticences, me demandant de quoi je voulais lui parler et ce que j'attendais. Je lui ai répété que je ne cherchais qu'à adoucir notre relation, pacifier ce qui pouvait éventuellement le nécessiter, afin de retrouver une aisance et une confiance dans nos rencontres. Là, de façon assez différente à ce que j'avais cru comprendre en février, elle évoqua sa méfiance à mon égard, ramenant à la surface pas mal d'éléments du passé en se référant à sa perception ancienne de mes attitudes d'autrefois. Fort déconcerté par ce climat de suspicion, qui ne correspondait absolument pas à l'harmonie que j'essayais d'instiller, mon sourire s'est figé, je me suis tû et rapidement mis en retrait. Elle m'a dit que sa confiance suivrait mes actes (lesquel ?), mais de mon coté je ne peux agir si je ne me sens pas en confiance. Et, précisément, je pensais que le dialogue était une bonne façon d'agir pour rétablir cette confiance... Charlotte a émis des propos assez négatifs, critiques, qui m'ont heurté et blessé. Elle s'en est rendue compte en voyant mon trouble. Je lui ai alors expliqué le malentendu que je percevais, l'informant aussitôt que je reportais sine die la rencontre en lui laissant toute liberté de revenir vers moi si un jour elle se sentait prête. Pour ma part je n'avais plus du tout envie de dialogue dans un tel climat. Nous avons donc convenu de ne pas donner suite à ma proposition réconciliatrice.

Sonné par son attitude fermée et rigide, j'ai immédiatement perçu que quelque chose en moi était profondément atteint. Une grande lassitude m'a envahi, assortie d'un puissant découragement. Ras le bol de me voir repoussé ! Dans les jours qui ont suivi j'ai senti monter en moi une (saine) colère contre ma "gentillesse", mon envie de pacification et de maintien des liens de qualité. Difficile, en effet, de ne pas voir quelques désagréables analogies avec un autre refus autour duquel j'ai tergiversé pendant des années avant de renoncer...

Déçu, meurtri, j'en suis venu à remettre en question un de mes principes fondamentaux : la fidélité relationnelle. J'ai même été tenté de carrément couper les ponts avec Charlotte. Je n'avais plus envie de la voir, plus envie d'avoir affaire à elle, plus envie de supporter ses récriminations et ses "conseils" infantilisants. Plus fort encore : je me suis demandé s'il était judicieux de rester "disponible" au cas où elle reviendrait vers moi ! J'en ai eu marre d'être "celui sur qui on peut compter", toujours présent quand on l'appelle et qui accepte les piques sans broncher. Je n'ai aucune envie de rester en relation avec une personne qui me considère comme incapable d'avoir évolué, infantile, et qui ne cherche même pas à savoir ce que je pense. « On ne change jamais » m'a t-elle affirmé, avec la morgue de "celle qui sait". Pfff, nous sommes visiblement trop éloignés l'un de l'autre, avec des cheminements divergents. Dommage, mais tant pis.

Depuis j'ai un peu réfléchi et je ne suis pas sûr que couper définitivement les liens me corresponde. Je suis plutôt du genre à "laisser la chance". Mais pas indéfiniment : je ne veux plus être un jouet qu'on utilise au gré de ses lubies. Il me revient de rester ferme sur ce point. Quant à "tendre la main", je ne me sens plus la force de le faire à répétition. Si l'autre ne la saisit pas, c'est que ce n'est pas le bon moment. Je crois que je préfère encore ne plus avoir de contact avec qui ne m'accorde plus sa confiance. C'est vraiment trop douloureux, pour moi, de savoir qu'une personne en qui moi je garde confiance m'a retiré la sienne. Je ne veux plus subir ça.


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La confiance éperdue



Dimanche 6 avril 2014


Les années passent et je comprends, à force de récidives, que je garderai probablement jusqu'au bout l'imprégnation qui a fait de moi un douteur de soi. Tout le travail introspectif que j'ai pu faire pour trouver la confiance qui me fait défaut semble n'agir qu'à la surface, ne diffusant que très peu dans les profondeurs. Il n'y aura pas de miracle : je resterai celui qui vacille dès que se rejoue le passé. Dès que je perçois, à tort ou à raison, que je ne suis pas apprécié. Ou pire : rejeté...

C'est comme ça, je dois me faire une raison. L'expérience traumatique m'a conditionné. Marqué au fer rouge. Peut-on se "déprogrammer" de nos automatismes, comme on le lit parfois ? J'en doute. Hors du contexte tout me parait clair, et j'ai l'impression de pouvoir maîtriser mes émotions, mais dans le feu de l'action... c'est comme si un mécanisme automatique s'enclenchait. Seul le délai de réaction entre l'automatisme et la conscience de sa mise en place se réduit. C'est déjà bien, mais pas suffisant.

Oui, on a tous besoin de se sentir aimé... mais certains probablement davantage que d'autres. Quand j'entends des personnes dire que dans leur enfance elles se sont senties aimées par leurs parents, choyées, encouragées, soutenues, je me dis qu'elles ont eu de la chance de pouvoir démarrer dans la vie avec cette assurance. Le dénigrement, au contraire, génère un lourd handicap. Oh je ne suis pas particulièrement à plaindre, et d'autres que moi ont vécu bien pire. Il n'empêche que les séquelles sont là.

Comment faire ? Comment éviter que ne se rejoue le scénario du rejet ? Comment parvenir à relativiser l'éventuel rejet que, à l'évidence, je peux surmonter aujourd'hui ? Après tout, ce n'est jamais grave : ce n'est pas parce qu'une personne me rejette, me repousse, me critique, voire me dénigre, que je serais "mauvais". D'autres m'apprécient, c'est certain. Et même si je me vois rejeté, ce n'est pas forcément moi qui suis rejeté mais la projection que l'autre fait de moi. Et puis ce peut n'être que temporaire, en réaction défensive, de la part d'une personne qui s'est sentie blessée par ce que j'ai dit ou fait.

Mouais... là je suis encore dans du raisonnement. Ce n'est pas là que se situe le problème, mais dans la situation réelle. La question serait plutôt : comment réagir au plus tôt (instantanément ?) dans une situation qui m'expose au sentiment de rejet ?

Je pense que cela passe par une vigilance à ces situations. Il me faudrait capter au plus tôt la montée émotionnelle qui me signale le danger imminent afin que... pfff, non, ça ne peut pas fonctionner : je n'ai pas le pouvoir d'arrêter l'autre. C'est de mon côté que je dois apprendre à "laisser glisser" la véhémence de l'autre. Peut-être en me disant que ce n'est pas moi qui suis concerné, mais une image de moi...

En y réfléchissant bien, je suis en train de réaliser que je reste particulièrement vulnérable au rejet de personnes à qui j'avais accordé... un excès de confiance. Les personnes d'avant la prise de conscience. Il me semble que de la part des personnes rencontrées après, je ne me suis jamais senti exposé au rejet. Parce que je ne me suis plus "abandonné" au point d'en être fragilisé, parce que je mesure ce que je donne de moi. Mes investissements affectifs n'ont plus été démesurés. Je n'ai plus placé en l'autre le pouvoir de me faire trop de mal. Je peux être affecté, peiné, blessé... mais plus au point d'en être trop profondément atteint. Je reste sensible et vulnérable, mais sans perdre mes moyens. Et si je me sens mal avec une personne il m'est relativement facile de me désengager sans dommages. Bon... il est vrai que j'ai poussé peut-être un peu loin le non-engagement, mais c'est la seule méthode qui m'a semblée viable. En fait j'ai réparti le partage relationnel sur une diversité de personnes, ce qui fait que je ne suis "dépendant" d'aucune en particulier. Il n'est plus question que je le sois.

Ce qui s'est passé avec Charlotte la semaine dernière n'est finalement que la continuation d'un processus de détachement : elle n'est qu'une parmi les autres. Et ce qui a existé entre nous, non seulement n'existe plus, mais ne permettra même pas à une confiance particulière de demeurer. Je pensais qu'on pourrait, après le temps de reconstruction chacun de notre côté, maintenir une forme d'amitié. Ce ne sera pas le cas. Je n'en ai plus envie...

La confiance est perdue.





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