Juillet 2009

Dernière mise à jour:dimanche 2 août 2009 - Accueil - Message






Je t'aime


Lundi13 juillet


Je l'avais pourtant écrit noir sur blanc : j'veux pas qu'on m'aime ! Ouais... mais tout le monde ne lit pas mes écrits. C'est certainement pour ça que j'ai entendu un « je t'aime », il y a quelques jours.

« Je t'aime ». Tout court. Sans tentatives d'atténuation, sans fioritures qui en auraient diminué l'impact.

Que puis-je faire d'une pareille déclaration ? Ça peut faire peur ces quelques mots, hein ? Ça sous-entend quoi, ça implique quoi ? Je n'ai pas été effrayé parce que j'ai confiance en celle qui me l'a dit, qui connait ma position. Je suis resté moi-même, sans plus. Un peu gêné quand même par cette offre disproportionnée. Un festin pour un appétit d'oiseau. Trop pour ce que je peux restituer. Alors j'ai reçu ces mots sans les refuser, sans les fuir, sans les encourager non plus. Sans tricher. Sans donner d'espoirs vains.

J'aurais pu la remercier...

Oui, elle m'aime. Elle me le dit... mais... c'est à elle. Ça lui appartient. Son besoin a été de me faire part de cet élan. Je l'ai reçu comme une confidence mais cela ne m'engage à rien.

Pas vraiment surpris : je le sentais. Je le savais. Il y a des comportements qui ne trompent pas. Comme le désir sexuel : il se perçoit sans ambiguité. Le doute ne porte que sur le désir de suivre le désir. Elle me désire et elle m'aime. Elle n'est pas la seule...

Heureux homme je suis, aimé et désiré au pluriel. J'en profite. Ça ne durera probablement pas. Ces amours attendent quelque chose que je ne peux rendre dans le même souffle.

Alors je fais quoi de ces amours, puisque je me situe dans un autre registre ? Je le vis comment ce décalage ? Ça signifie quoi ce « je t'aime » ? Ça appelle quoi ? Ça demande quoi en retour ? La réponse est claire : un souhait de réciprocité. Je comprends ça. Elle m'a demandé si je pouvais lui dire que je l'aimais...

Non, je ne dis pas ces mots-là. Je les sent trop chargés de représentations, trop sensibles, trop détonants. Et puis... je n'aime pas comme ça. Pas comme c'est attendu, désiré, souhaité. J'aime d'affection, mais pas d'amour au sens où on l'attend. Je ne suis pas amoureux. Mais allez faire comprendre ça sans déclencher une douleur...

Pfff, c'est compliqué l'amour...

Qu'est-ce qu'elle aime de moi ? Peu importe. Elle aime ce qu'elle perçoit de moi, qui ne suis que le support de ses projections. Elle aime ce que je représente à ses yeux. Elle m'aime parce que je correspond à ce qu'elle désire trouver en moi. Elle m'aime parce qu'elle me désire et que son corps à soif du mien. Elle m'aime parce que devant moi elle vit, maintenant, quelque chose d'intense, de révélateur et que cela lui fait changer son regard sur elle-même et sur le monde. Elle m'aime parce qu'à mes côtés elle évolue, grandit, se transforme. Comme elle l'attendait sans plus y croire. Elle m'aime... tant que cela existe. Tant que notre façon de vivre cela est compatible. Tant que ma différence n'oppose pas de limite.

Elle m'aime de façon conditionnelle. Comme nous tous. Ce n'est pas vraiment moi qu'elle aime. Je le sais. Et je ne suis pas du tout sûr qu'elle acceptera celui que je suis vraiment. Libre d'être moi. Différent. Ce n'est qu'à ce moment là que je me sentirai aimé pour ce que je suis.

Aime t-on jamais un autre que soi ?





Envie de l'écrire




Mercredi 15 juillet


Lorsque j'ai ouvert Alter et ego (Carnet), distinct de ce site mais affilié par le même nom, c'était pour tenter de résoudre une difficulté à écrire. Une tentative d'échapper au journal dont le contenu me semblait « tourner en rond » autour d'une problématique insoluble à ce moment-là. Le Carnet, sous forme de blog, était donc une expérience, dont j'ignorais la durée de vie. Quatre ans plus tard je constate que l'expérience dure encore...

La formule, dont les principales différences tiennent à la possibilité d'interaction en public et la plus grande visibilité dans la blogosphère, m'a permis de découvrir bien des champs qui seraient restés insoupçonnés par le journal. L'ouverture au "débat public" m'a souvent permis d'aller plus loin, plus vite, et surtout là où je n'aurais pas pensé ! Je crois aussi qu'une certaine convivialité a permis un autre type d'échanges, plus direct, léger, intuitif, émotif, et m'a obligé à sortir de mon mode de pensée très cérébral.

A l'inverse cette convivialité a souvent eu tendance à me distraire, à m'égarer. Plus grave encore : à générer une attente de réactions. Au point que je m'en suis souvent senti "dépendant", ce que je déteste.

Pour moi les deux façons d'écrire ont leurs particularités, donc leur raison d'être. Je sais que pour des lecteurs la différence n'est pas forcément perceptible, mais moi je sais que je n'écris pas avec le même état d'esprit ici et là-bas. Et je sais toujours à l'avance sur quel support je vais m'élancer. Je n'ai pratiquement jamais changé en cours ou en fin de rédaction.

Si sur le Carnet il existe une convivialité, ici est le domaine de la confidentialité. Oui, je sais bien que sur internet ça ne veut pas dire grand chose. Et pourtant, il y a bien une différence. La même qu'entre un livre et une rencontre-débat avec son auteur. En public l'interlocuteur se montre, entre en interaction avec l'auteur et peut lui aussi jouer des "effets de scène". Quelque chose parasite l'échange. L'authenticité de l'échange, devrais-je dire. Elle peut le fertiliser comme le pervertir. C'est aléatoire.

Ici, sur ce journal, nos éventuels échanges, rares, sont privés. Je sens (à tort ou à raison), un intérêt et une bienveillance. Un respect. Une curiosité réceptive. C'est le silence qui veut ça. Ceux qui me lisent ici le font souvent depuis des années, parfois depuis l'origine, et certains ne me lisent qu'ici.

C'est sur cette représentation que j'ai de mon lectorat que mes pensées se transmutent en mots. Elle est fondamentale dans la façon dont je vais m'exprimer, et c'est en cela que les deux écritures sont à mes yeux différentes.

Ici je me sens davantage "protégé".



Cependant...

Chacun de mes anciens lecteurs sait ce qui est passé "ici" il y a quelques années. Quand je dis "ici" je veux parler de cet espace virtuel d'expression et de ce qu'il contenait (et contient encore).

Il y a des choses dont je n'ai plus voulu parler. Le journal s'est en quelque sorte vidé de sa substance. Un grand silence s'est fait, une zone d'ombre s'est étendue jusqu'à masquer le coeur du contenu. Mes reflexions ont tourné autour d'un indicible. De l'intouchable.

C'était devenu absolument indispensable. J'ai ainsi pu m'excentrer de ce point qui absorbait mes pensées. Éclipse d'un soleil devenu noir. Autour j'ai pu voir une autre lumière. Ce serait prétentieux de dire que c'est la mienne... mais il y a de ça quand même. N'étant plus ébloui j'ai pu voir le monde autrement.

Ce n'est ni par les écrits du journal ni par le Carnet que cela s'est révélé... et pourtant ces modes d'expression ont joué un rôle de premier plan. Peut-être parce que l'indicible restait en filigrane ? C'est grâce à votre présence de lecteurs et des interactions qui ont eu lieu, ouvertement ou en coulisses, par écrit ou de vive voix. Si une part du travail de défrichage et de découverte de nouveaux horizons s'est faite grâce aux écrits publics, je crois que c'est dans l'intimité des confidences que se sont ajustées les pensées les plus fines et qu'ont germé les graines les plus précieuses. Le labour s'est fait par les écrits mais les fruits se sont récoltés dans le silence de présences amies. Sans "vous" je n'en serais pas là. Je ne serais pas parvenu à ce degré de paix intérieure... que mes écrits expriment sans doute fort peu !

C'est avec ceux et celles qui m'ont permis de me sentir en confiance que j'ai pu me rendre compte des étapes que j'avais franchies en solitaire. J'en suis heureux.

Je ne sais pas si un jour mon écriture pourra témoigner de cette sérénité qui m'habite, mais elle est bien là. J'avais envie de l'écrire...







Transformation silencieuse




Dimanche 19 juillet


Un épais silence s'est installé dans mes écrits au sujet de ce dont je ne devais plus parler. Ce dont, finalement, je n'ai plus voulu parler. Pendant ce temps une transformation a opéré.

Entre ce que je décrivais il y a cinq ans et ce que je suis devenu aujourd'hui, c'est toute une perception du monde qui a changé. Long travail de maturation intérieure, solitaire, qui a permis à un homme nouveau de renaître. 

Quelque chose est mort dans ce processus.

Quelque chose a continué à vivre aussi, envers et contre toutes les calamités. Une source d'énergie qui s'est montrée infaillible, qui a résisté à tout. Une force incroyable de ténacité et de persévérance.

Ce qui est mort c'est la dépendance affective. Je crois pouvoir affirmer que je ne revivrai jamais cet enfer. Je l'ai bu jusqu'à la lie, depuis la déchéance abyssale jusqu'au long purgatoire de l'acceptation pleine et entière. Seul. Avec, au bout, la libération.


(mis en ligne le 2 août)




À la recherche du désir




Vendredi 24 juillet


Si je commençais un journal aujourd'hui peut-être l'intitulerais-je : "À la recherche du Désir". Inlassable recherche que je mène depuis plus d'une décennie et comprenant maintenant qu'elle se résume à cette concentration d'énergie que l'on nomme Désir. Avec sa majuscule. Le Désir comme pulsion de vie, comme moteur de l'existence, comme attraction vers le dépassement de soi.

Désir trop longtemps refoulé, ignoré, balisé, calibré, inhibé, qui malgré tout à cherché à exister et se faire entendre. Désir qui, après quelques tentatives, s'est finalement libéré en grand grâce à une rencontre révélatrice. La suite est connue...

Après moult péripéties j'ai fini par comprendre que ce qui s'était écroulé n'était pas mon Désir à peine émergé mais la confusion que j'avais fait entre le désir que j'avais pour une personne et le Désir en tant que pulsion de vie. C'est tout ce travail de différenciation qui s'est déroulé depuis cinq ans. Scinder ce qui tenait de l'un et de l'autre. Accepter l'impossibilité d'accéder à un désir sans pour autant renoncer à la moindre parcelle de l'élan vital du Désir. La disctinction a été longue à s'installer...


(mis en ligne le 2 août)



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