Octobre 2010

Dernière mise à jour:dimanche 7 novembre 2010 - Accueil - Archives - Message






[Journal à publication différée]

Craintes contagieuses




Publication du 19 octobre
Dimanche 22 août


Je passe d'un lieu d'écriture à l'autre, selon une logique pas forcément claire pour d'autres que moi. Peu importe : moi je sais pourquoi je choisis l'un ou l'autre de mes espaces, selon ce que je souhaite exprimer ou taire.

C'est ici que j'ai entrepris ma grande réflexion sur le deuil post-rupture, mais sur le blog que je l'ai poursuivie. C'est là-bas que me sont apparues, grâce aux brassage d'idées instillées par les commentaires, quelques pensées demeurées jusque là informulées, si ce n'est inconscientes. J'avais besoin de sentir des présences interactives, a priori bienveillantes, afin de garder une distance suffisante avec mon sujet. Maintenant je reviens ici, pour une expression plus personnelle.

Je veux reprendre un extrait de mes propres mots, que je trouve assez significatif. Il fait apparaître une dualité entre différents états de ma conscience, variant selon le registre d'expression dans lequel je me situe [le Moi-écrivant n'est pas le même ici et là-bas...]. Plus important encore, ces quelques phrases mettent en évidence une ressource intérieure dont j'oublie parfois être dépositaire...

Au sujet de la durabilité des relations fortes [*], qui aura été la grande révolution de ma perception des rapports affectifs, je répondais à un commentaire ainsi : « Je me rends compte que la crainte est contagieuse et que c'est le regard vers un avenir incertain qui peut précipiter une fin par crainte de ne pouvoir vivre ce qui est là au présent.

Tu me fais prendre conscience que je n'ai peut-être pas si peur de la fin que je le laisse entendre... C'est plutôt que je redoute la peur de l'autre, en sachant qu'elle pourra lui faire précipiter la fin ! [oh ben dis donc, en voila une découverte !!!]

Je crois que je suis très confiant par nature, en la vie, en moi et en l'autre. Mais l'expérience m'a enseigné que d'autres n'avaient pas cette confiance intérieure... et que leur insécurité pouvait miner mon assurance au point que je perde contacte avec mes ressources. Je me demande si je ne suis pas vulnérable aux insécurités de l'autre... »


Ces quelques mots ont eu force de révélation. Alors que j'affirme souvent manquer de confiance en moi, il m'est apparu que ce n'était pas aussi direct que je le croyais mais que c'est en passant à travers le regard de l'autre que j'avais, ou pas, une confiance suffisante en moi. Du reste je sais depuis longtemps que, seul, je ne manque pas d'assurance. Je n'en manque pas non plus si je sens qu'on me fait confiance. En revanche si je me sens évalué, testé, critiqué, culpabilisé, rejeté, dévalorisé ou découragé dans mes élans, je perds très rapidement confiance en mes capacités. C'est mon point de faiblesse majeur. Même chose si on me refuse ce que je désire... car je le ressens comme si c'étaient des désirs inappropriés, dérangeants, voire stupides.

C'est en cela que je me sens encore très "enfant" : j'ai besoin de me sentir en confiance pour me sentir bien. C'est à dire qu'on me fasse confiance. Qu'on me reconnaisse à ma « juste valeur ». Ni surévalué, ni dévalorisé. De ce besoin essentiel peut naître ma dépendance...

Irrationnelle dépendance puisque s'exerçant envers des personnes peut-être aussi immatures que moi, elles aussi en recherche de sécurité au sein d'un jeu d'apparences où la position de chacun influence celle de l'autre.

Pour garder la confiance de l'autre il m'est arrivé de perdre contact avec moi-même, de nier mes besoins... dans la crainte d'être rejeté en étant "moi-même". Attitude qui, fondamentalement, confirme à l'autre qu'il ne peut pas me faire confiance puisque je faiblis sous l'épreuve qui me teste ! C'est pour ne plus me trouver aspiré par cette véritable soumission aux angoisses existentielles de l'autre, perdant sens critique, consistance, rigidité, que j'ai choisi de me retirer, temporairement, dans une vie de solitaire. Le temps de reprendre contact avec mes ressentis profonds, sentir mes ressources, et retrouver confiance en mon intuition.







[Journal à publication différée]

Le désir de finir




Publication du 23 octobre
Lundi 23 août


Je ne sais pas trop ce qui s'est passé au cours de ces sernières semaines, mais... quelque chose a évolué ! Peut-être est-ce que cela s'inscrit dans le même mouvement que ma réflexion sur les deuils ? Peut-être est-ce parce qu'une échéance est arrivée à son terme ? Ou peut-être est-ce simplement que j'ai parcouru suffisamment de chemin...

Toujours est-il que... oui, je sens que je passe un cap ! Et ça se fait tout simplement...

Il paraît que la durée "normale" d'un deuil est de un à deux ans. Je ne sais pas ce qu'il en des pour les ruptures compliquées. Je suppose que ça dépend de la complication... Moi ça fait six ans que je travaille sur une succession de deuils imbriqués. Sept ans si j'ajoute le deuil de ma vie conjugale. Ça peut paraître énorme, quand on cumule. Sauf que ça n'aurait pas beaucoup de sens : chaque grand renoncement a réinitialisé le processus. Même s'il ne s'agissait pas de tout reprendre à zéro...

Je crois que je suis parvenu au terme de la série. Non pas que tout soit devenu léger, mais... plus rien n'est vraiment pesant. L'acceptation a fait son oeuvre et l'élaboration se poursuit lentement. Tranquillement.

Ce qui me surprend c'est que ce travail m'a placé à deux niveaux de perception. J'en ai de plus en plus l'évidente conviction. Il y avait l'adulte, sain d'esprit, responsable, pragmatique. Et puis il y avait en même temps cette part infantile qui ne parvenait pas à accepter. Le premier était capable d'acceptation, de recul, de compréhension. Il disait "oui" à ce qui advenait, l'incorporait à son vécu, tout en gardant ses convictions. Le second... ne parvenait pas à comprendre. Ici c'est souvent le second qui s'est exprimé. Trop souvent à mon goût. Mes écrits n'étaient pas représentatifs de ma pensée profonde.

J'ai à peu près décrypté ce qui se jouait sur cette scène publique. Parce que si c'est là que ça se déroulait, et uniquement là... c'est bien qu'il y avait un enjeu particulier. Je me suis souvent interrogé sur le rôle exact que tenait ce journal dans une dynamique post-relationnelle et je peux dire maintenant que les effets délétères étaient nombreux et particulièrement préjudiciables. Qu'en aurait-il été si je m'étais abstenu ? L'histoire bizarre aurait-elle évolué différemment ? Difficile de le savoir...

J'ai eu l'occasion de constater qu'ici j'écrivais dans un important décalage temporel. Avec force retenue et moult autocensure je ne "lâchais" des éléments que longtemps après en avoir pris conscience, et parfois même après les avoir exprimés directement à qui je voulais le dire. Pire : je les exprimais ici avec douleur et amertume alors que je les avais énoncés beaucoup plus modérément et ouvertement en privé. Pourquoi cette répétition amère ? Probablement par déception de voir que ça ne permettait pas de rétablir un lien de confiance...

Peut-être aussi pour rétablir une image écornée.






[Journal à publication différée]

Presque plus moi




Publication du 23 octobre
Mercredi 25 août


Lorsque je tends vers le plus intime de moi, vers le plus sensible, le plus vulnérable... je touche souvent une part venue tout droit de l'enfance. Quelque chose de brut, encore trop sensible pour avoir été élaboré. Ce n'est qu'à force d'exposer cet intime, en l'extrayant de moi, que je l'incorpore dans mon être entier. Ainsi ce que j'exprime à ces moments-là n'est pas vraiment moi, mais seulement un morceau archaïque de moi en train de s'intégrer à mon personnage réel actuel. Finalement plus je vais vers l'intime fragile, le profond Moi de l'enfance... et plus j'entre en contact avec un nouveau moi en train de naître. Cet intime ce n'est pas moi. C'est un passé qui s'actualise.

C'est peut-être pour ça que je peux me dévoiler sans trop de retenue : je ne suis presque plus celui que je montre.


Ajout du 23 octobre : je pourrais aussi dire que, dans d'autres domaines, je ne suis pas encore celui que je montre. Ainsi l'introspection s'inscrirait entre rétrospection et prospection, de sorte que le Moi resterait toujours indéfinissable...





[Journal à publication différée]

Obéissance



Publication du 31 octobre
Samedi 28 août


Je maintiens hors-ligne mes écrits depuis plusieurs semaines. Ça se fait tout seul. Je reporte la publication. Pas envie, ni besoin, de dévoiler ce qui m'apparaît. Je le sens encore trop frais, peut-être encore un peu fragile. Pourtant je prévois de le faire un jour puisque j'écris sur le logiciel qui me permet de transférer mes pages sur le web...

Je prends doucement conscience que je ne suis pas ce que je dis être. C'est assez bizarre en fait. Difficile à décrire. Il y a vraiment une notion de dualité enfant/adulte. Et de plus en plus la part d'enfant me semble inconvenante à montrer. Parce que c'est quelque chose de finissant. Un état dont chaque jour je m'éloigne davantage, tandis que j'évolue vers une maturité qui a peu de raisons de s'exprimer, parce que bien assumée, solidement implantée.


* * *



Il y a un élément bien particulier dans mon aventure de vie écrite et publiée : elle s'est libérée en s'inspirant d'une grande idée d'ouverture qui, en affrontant le réel, a montré ses limites. J'ai cru, j'ai vraiment cru que de me dire sincèrement aller me libérer. Les circonstances ont conduit à ce que ce soit exactement l'inverse qui se produise. Peu à peu mon écriture s'est trouvée enserrée dans une censure. Des interdits sont venus de là où je les attendais le moins. Ce revirement m'a très fortement surpris... et longtemps désorienté.

Depuis le temps que je déroule le fil des évènements dans un sens et l'autre j'ai acquis certaines convictions. D'hypothèses en déductions, d'observations en confirmations, je suis parvenu à établir un scénario vague, plausible, de ce qui a pu se passer dans la grande épopée relationnelle qui colonise mes pensées depuis des années. Il reste beaucoup d'incertitudes et de zones d'ombres mais je crois que j'ai à peu près décrypté l'essentiel.


* * *



« Chercher à comprendre c'est commencer à désobéir ». Voilà, paraît-il, une formule prisée par les militaires. Ça ne serait pas surprenant : on ne demande pas aux militaires de comprendre, mais d'exécuter des ordres. D'autres pensent pour eux...

Désobéissance. J'aime ce terme autant que je le réprouve. Moi qui suis tellement respectueux des lois et des règlements, je m'en veux d'être aussi obéissant. Parfois je me déteste en obéissant. Je garde un esprit... non pas rebelle, mais détestant la soumission à l'autorité et aux tentatives de contrôle de la pensée. Il suffit que l'on m'oblige à faire quelque chose pour que je sois très tenté de faire exactement l'inverse. Je ne reconnais à personne le droit de me dicter ma conduite.

Pourtant... je suis désespérément obéissant. Pour ne surtout pas me sentir "rejeté". Vestiges tenaces d'une enfance apeurée : l'obéissance m'avait paru être la seule planche de salut. Toute ma vie j'ai été obéissant, préférant éviter remous et conflits. C'était une erreur, tardivement comprise.

Il m'est arrivé de prendre mon obéissance comme une soumission, parce que la nuance est subtile. Fausse interprétation : je ne me suis jamais soumis. Mais j'ai obéi... au prix de colères intériorisées. Colères domptées, mais susceptibles de ressurgir à tout moment. Colères salvatrices qui m'ont fait réagir.



Mois de novembre 2010