Novembre 2009

Dernière mise à jour:samedi 5 décembre 2009 - Accueil - Message
















Aberration



Dimanche 9 novembre
[mis en ligne le 28 novembre 5 décembre]


Malaise autour de mon écriture... Hésitations sur la suite à donner. Est-ce que le bilan est encore positif, entre ce que ça me permet d'élaborer et ce que ça me coûte en évitement ? Car c'est bien là mon problème : ce que j'évite d'aborder.

Ce journal est né, il y a bientôt dix ans, autour d'une révélation : ce que j'exprime de mes faiblesses me rend plus fort.

Aujourd'hui j'en suis venu à des stratégies d'évitement. Je n'exprime plus ce que j'aurais envie de d'écrire. J'utilise ma "force" pour me contenir. L'inverse de ma démarche initiale ! C'est une aberration.

Est-ce qu'au moins j'y gagne quelque chose ? Pas sûr...

Alors... cesser d'écrire puisque je ne me sens pas suffisamment libre, ou... écrire sous un autre angle ?

Libre je le suis, bien sûr. Si je suis dans la rétention c'est parce que je le choisis. Je l'ai choisi... Mais, est-ce que ce choix est encore pertinent ? N'ai-je pas, par ma retenue, suffisamment évolué pour aborder les choses autrement ?

Posons les éléments : j'ai ouvert un blog pour « parler d'autre chose », à un moment où je me sentais étouffer sur ce journal. Quelques années plus tard je me retrouve régulièrement [pas en permanence, quand même !] à étouffer sur le blog tout en ayant désinvesti le journal, à force d'évitement.

Étouffer ça veut dire quoi ? Que bien souvent je ne "respire" plus suffisamment, que je me sens à l'étroit dans le cadre que je me suis imposé.

Quel cadre ? Celui de ne plus évoquer... ce qui est au coeur de mon cheminement. Ou du moins qui a pris suffisamment de place pour ne pas pouvoir être passé sous silence sans contorsions complexes et pénibles. Quelque chose qui prend d'autant plus de place que je ne veux pas l'évoquer, tel un secret qui amplifie l'importance de ce qu'il veut cacher.

Qu'est-ce que je cache ? Mon cheminement, dans certaines dimensions, depuis... l'innommable.

Là est peut-être la brèche : il y a ce que je ne nomme plus d'un côté et le cheminement de l'autre. Je n'ai pas forcément besoin de nommer pour parler du cheminement. Je n'ai pas besoin de donner de détails pour dire à quoi je parviens. Ou du moins... il y a certainement des façons de parler d'une chose en ne nommant que ce qui me concerne. Car le noeud du problème se situe là : je ne suis pas seul concerné.

Une question me vient en tête, là : et pourquoi écrire en public ? Ben oui, je pourrais très bien avoir une écriture totalement libre pour moi seul !

Sauf qu'à mes yeux ça n'aurait pas de sens. Je pense seul, mais j'écris pour partager. Ou pour être entendu/lu, plus précisément. En fait, pour que soient "reconnus" mes ressentis, mes agissements. Façon de les légitimer, de les valider.

Oui, c'est ça : j'ai envie d'être reconnu dans mon cheminement.
C'est probablement une faille...

Pourquoi ce besoin de validation ? Parce que j'ai trop ressenti de désapprobation à ce sujet. Comme si je me trompais, comme si j'agissais mal. A tel point que parfois je ne savais plus du tout que penser. C'était une torture que de sentir une aspiration à agir selon ce que je pensais "juste et légitime", allant dans un "bon" sens, et que me soit renvoyé l'image d'une erreur. Ma confiance en moi était malmenée par ces avis opposés.

Ce que j'ai envie de dire est que j'ai vécu quelque chose de très très dur, psychiquement parlant. Non pas pour attirer la compassion, mais simplement pour que soient reconnus les efforts que j'ai fait pour en sortir tout en préservant au mieux ce qui devait l'être. Ce que j'ai envie de dire aussi, et surtout, c'est que mes efforts ont porté. Et que ça vallait la peine d'y avoir consacré autant d'énergie.

C'est simplement ça que je voudrais exprimer.

Dire que, pour préserver ce que je considérais comme l'essentiel, j'ai tout fait.
J'ai tout fait et j'étouffais...

J'étouffais de ne pouvoir librement m'exprimer, librement être ce que je suis. J'étouffais et quelque chose allait en mourir. Quelque chose qui devait mourir : ma soumission, ma peur du rejet, ma peur de la perte. Ma dépendance envers une dont j'avais peur de perdre la précieuse amitié.

L'agonie s'achève lentement...

Je n'ai rien perdu de ce qui a été, seuls mes espoirs de le voir durer ont été déchirés. Voila pourquoi je n'ai plus jamais placé d'espoirs dans une amitié.







Changer d'ère




Samedi 28 novembre
[mis en ligne le 5 décembre]


C'est du milieu de l'été, le 2 août, que date le dernier texte mis en ligne ici. D'autres, écrits à la suite, ont été retenus in extremis ou différés sine die. Aujourd'hui je les oublie [lapsus] publie par désir de rester cohérent avec mon pari initial : ne rien supprimer de ce que je dépose ici. En règle générale je m'y suis tenu. Quelquefois j'ai eu recours à des publications différées mais il a été extrêmement rare que je me sois censuré après avoir écrit. Quasiment rien de ce que j'ai pensé publiable en l'écrivant n'est resté enfoui. Par contre j'ai souvent retenu toute forme d'expression publique....

Il y a quelque chose d'absurde à publier en différé, d'autant plus que je ne me retrouve plus aujourd'hui dans ce que j'ai écrit il y a quelques semaines, mais il y a là les traces d'hésitations significatives de ma difficulté à me sentir "libre d'écrire".

Libre ? Bien sûr je ne le suis pas. La retenue - pour ne pas dire l'auto-censure - avant et pendant l'écriture, fait partie intégrante du processus de conscientisation de mes limites dans l'expression de moi. Indirectement l'écrit me convie à une réflexion sur les limites à préserver entre l'autre et moi. Souvent tenté par l'épanchement "libérateur" j'ai senti agir diverses formes de retenue qui m'ont permis de chercher des façons de m'en émanciper. Et, au contraire, de privilégier la discrétion lorsque nécessaire.

Si je reviens vers ce journal aujourd'hui c'est parce que quelque chose a opéré et que la situation a changé. Oh je ne me sens pas devenu subitement "libre", ni ne ressens le besoin soudain de m'affranchir des barrières que je me suis fixé. Non, il s'agit seulement d'un changement de regard : je n'ai plus l'impression d'être enfermé dans un choix contre nature. Je suis sorti de la révolte contre un baillonnement que j'ai parfois eu bien des difficultés à maintenir.

Après que j'aie pris conscience que je dépensais beaucoup trop d'énergie dans la rétention des mots, et depuis bien trop longtemps, après que je m'en sois vu épuisé bien davantage que je ne l'aurais imaginé, il fallait que, d'une façon ou d'une autre, je sorte de la boucle infernale auto-entretenue : avoir besoin d'écrire autour du fait que je ne me sentais pas libre de le faire. M'interdisant d'en parler publiquement je ne parvenais pas à clore ce chapitre et à vraiment reprendre la route.

Il se trouve que désormais ce problème est résolu ! Je devrais même dire qu'il s'est évaporé. Volatilisé. Dissoud. Il n'y a tout simplement plus de problème !

Une page s'est tournée.

Et j'ai envie de changer d'ère...



Immédiatement j'ai senti revenir l'envie, maintes fois caressée, de prendre de la distance par rapport à mon carnet. Je le trouve un peu trop "ouvert" pour que je me sente à l'aise lorsque j'évoque certains aspects de ma vie intime. Le journal, par sa faible visibilité sur le web, offre une confidentialité qui me semble bien plus adaptée.







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